Dans les situations où
l’inflammation et les douleurs touchent de nombreuses articulations, petites et
grandes, il est tout à fait compréhensible que le patient recherche une
« étiquette » diagnostique. Il serait rassurant pour lui de savoir
que sa maladie est connue et sous contrôle. Avec les moyens qui sont à sa
disposition, le médecin recherche aussi, comme le disait un de nos collègues, « une
certitude dans un domaine qui est souvent plein d’incertitudes ».
Avec une évolution de plusieurs
mois, je pense qu’on peut raisonnablement écarter le diagnostic d’arthrite
infectieuse, par exemple d’origine virale : ces arthrites infectieuses ne
s’étalent pas au-delà de quelques semaines.
L’atteinte polyarticulaire,
bilatérale et apparemment symétrique oriente bien entendu vers le diagnostic de
polyarthrite rhumatoïde, qui débute le plus souvent dans la deuxième ou
troisième décade et plus souvent chez la femme que chez l’homme. Dans votre
description, deux éléments sont inhabituels : les douleurs du bas du dos
et les « enflures rouge-bleu » des chevilles, changeant de
place ». Ceci évoquerait plutôt le diagnostic d’arthrite psoriasique
(d’autant plus que vous avez eu des manifestations cutanées de psoriasis) ou d’entéro-arthrite
(polyarthrite liée à une maladie inflammatoire du gros intestin, telle que la
maladie de Crohn ou la colite ulcéreuse). D’autre part, il serait important
d’exclure une autre maladie inflammatoire du tissu conjonctif (connectivite)
par la recherche des auto-anticorps.
Dans la période initiale de la
maladie, on trouve habituellement des signes inflammatoires non
spécifiques dans les examens sanguins (élévation de la vitesse de
sédimentation globulaire et de la C-Réactive-Protéine). Mais l’absence de
facteur rhumatoïde n’exclut pas le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde. De
même l’absence d’érosions caractéristiques sur les petits os de la main n’exclut
ni la polyarthrite rhumatoïde ni l’arthrite psoriasique.
A ce stade, c’est essentiellement
l’examen clinique qui doit permettre le diagnostic différentiel :
aspect et surtout répartition des articulations touchées, intensité et
variabilité des manifestations inflammatoires, horaire de la raideur
articulaire, etc.
D’autre part, s’il existe un
épanchement articulaire, les examens du liquide synovial peuvent apporter des
précisions supplémentaires.
En réponse à vos questions, je
dirai :
- La
précision du diagnostic n’est pas seulement importante pour vous ;
elle influencera le choix thérapeutique.
- Les
anti-inflammatoires non stéroïdiens que vous prenez en association n’ont qu’un effet
suspensif (effet insuffisant dans votre cas). Après plusieurs mois
d’évolution, un traitement de fond doit être envisagé.
- Dans toutes ces incertitudes, il existe pour moi une
seule certitude : « on ne peut pas être certain que tout va
rentrer dans l’ordre et ces douleurs disparaître ».
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